LA NÉCROPOLE CELTIQUE À
LUDAS – VARJ Ú-D L
sous la direction de
Miklós Szabó
assisté de
Károly Tan kó et Zoltán Czajlik
avec la par ticipation de
Katalin T. Br uder, László Domboróczki, Nicola Bianca Fábr y,
Katalin Gherdán, Jean-Paul Guillaumet, Ferenc Gyulai, Stéphane
Marion, Armelle Masse, Patrice Méniel, Ferenc Molnár,
György Szakm ány et Éva Tan kó
Budapest
2012
SOMMAIRE
MIKLÓS SZABÓ : INTRODUCTION
7
1. MIKLÓS SZABÓ – KÁROLY TANKÓ :
LA NÉCROPOLE CELTIQUE À LUDAS – VARJ Ú-D L
1.1.
Histor ique de la recherche
1.2.
Catalogue
1.3.
Les sépultures
1.4.
Par ures et accessoires vestimentaires
1.4.1. Les fibules
1.4.2. Les par ures annulaires
1.4.3. Bijoux à décor de pseudo-fi ligrane et de pastillage
1.4.4. Les bélières
1.4.5. Chaînes de ceinture fém inines en fer
1.4.6. Agrafes de ceinture
1.4.7. Pendentif
1.5.
L’armement
1.5.1. Les épées et fourreaux
1.5.2. Les pointes de lance
1.5.3. Les boucliers
1.5.4. La destr uction r ituelle de l’armement
1.6.
Les outils en fer
1.6.1. Les couteaux
1.6.1.1. Les coutelas
1.6.1.2. Les couteaux à dos incur vé à tranchant interne
1.6.2. Les ciseaux
1.6.3. Les faucilles
1.7.
La céram ique
1.8.
La chronologie relative de la nécropole
1.9.
En guise de conclusion
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141
150
2. ZOLTÁN CZAJ LIK (éd.) :
ÉTUDES SUR LA NÉCROPOLE CELTIQUE À LUDAS – VARJ Ú-D L
2.1.
2.2.
2.3.
LÁSZLÓ D OMBORÓCZKI :
Recherches archéologiques à Ludas – Var jú-dűlő
ZOLTÁN CZAJ LIK – KÁROLY TANKÓ – KATALIN GHERDÁN :
Recherches m icrorégionales dans les environs de Ludas
NICOLA BIANCA FÁBRY :
Les anneaux à oves creux de la nécropole laténienne de Ludas
153
155
171
181
2.4.
2.5.
2.6.
2.7.
2.8.
2.9.
2.10.
STÉPH ANE M ARION – J EAN-PAUL GUILLAMET :
Couteaux, forces et autres instr uments dans les sépultures de Ludas
É VA TANKÓ :
L’Étude des trouvailles anthropologiques de la nécropole celtique de Ludas
PATRICE M ÉNIEL :
Les offrandes anim ales de la nécropole celtique de Ludas – Var jú-dűlő
F ERENC MOLNÁR – ZOLTÁN CZAJ LIK – ARMELLE M ASSE :
Analyse archéométallurgique des bracelets et anneaux de cheville
celtiques en bron ze m is a jour à Ludas
KATALIN T. BRUDER :
Obser vations d’ordre technologique concernant la fabr ication du
bracelet celtique de Ludas à décor de pseudo-fi ligrane
K ATALIN GHERDÁN – ZOLTÁN CZAJ LIK – GYÖRGY SZAKMÁNY – KÁROLY TANKÓ :
Analyse de la provenance des céram iques de la nécropole de Ludas –
approche pétrographique
F ERENC GYULAI :
L’examen archéobotanique de la nécropole celtique de Ludas – Var jú-dűlő
189
197
219
249
267
269
279
3. BIBLIOGRAPHIE
299
4. PLANCHES (I-LV)
321
5. PLAN
2.4. COUTEAUX, FORCES ET AUTRES INSTRUMENTS DANS
LES SÉPULTURES DE LUDAS
Stéphane Marion – Jean-Paul Guillaumet
Près du tiers des sépultures de la nécropole de
Ludas (22 sur les 71 tombes conser vées) contiennent un ou plusieurs couteau x forces et autres
instr uments. Les couteaux et forces sont des catégor ies aisément reconnaissables m ais à usages
multiples : objet de toilette, accessoire domestique de con som m ation et de préparation alimentaire, outillage spécialisé. Pour en préciser
l’usage, les détails mor phologiques et techniques
permettent de les comparer avec des pièces plus
récentes dont l’usage est bien con nu (KAURIN
20 0 8). Les associations repérées dans les assemblages funéraires et la situation des objets au sein
du dépôt, constituent une seconde série d’indices
pour déterm iner leur usage et leur fonction.
L’ORGANISATION DES DÉPÔTS
Com me dan s de nombreuses nécropoles d’Europe Centrale, les sépultures à incinération de
Ludas présentent une organ isation codifiée des
dépôts. En dépit de var iation s de composition,
d’or ientation et d’organ isation de détail de leurs
composantes, plusieurs groupes se distinguent.
Les restes incinérés de l’individu, raison d’être de
la str ucture, sont généralement déposés, groupés sur le fond de la fosse ou dan s un contenant, identifié dan s de rares cas, à un vase bas
et ouver t de moyen ne dimen sion de t ype écuelle
ou plat (SZABÓ – TANKÓ 20 0 6). Ils sont le plus
souvent associés au x objets directement liés au
défunt sur tout des par ures et accessoires vestimentaires (an neau x et fibules). Les restes de
faune attestent d’un dépôt de viande. Com me
l’a montré l’étude taphonom ique des restes osseu x (MÉNIEL 20 0 6), il s’organ ise à l’intér ieur
d’un espace quadrangulaire qui cor respond à
un contenant ou un plateau en m atér iau pér issable. Il est souvent lié à un couteau. Ce dépôt
de viande, toujours isolé du reste du mobilier,
con stitue une zone de dépôt bien identifié. Cette
logique spatiale per met d’identifier un troisième
en semble composé habituellement de plusieurs
vases hauts ou moyen s fer més (vases de stockage, pots et cr uche à anse) et clairement séparés
des deu x autres. Les vases bas ouver ts de présentation ou de consom m ation (écuelles ou plats)
semblent s’affranchir en par tie des r igueurs de
cette logique. Le plus souvent simplement associés au x autres vases, ils sont aussi en position
inter médiaire entre les différentes zones identifiées (entre les autres vases et la viande, entre les
vases et l’individu ou encore en position centrale
entre ces trois zones) et aussi avec les restes de
l’incinération lorsqu’ils ser vent d’ur ne. Un quatr ième dépôt caractér ise la classe des guer r iers :
la panoplie d’ar m es offen sives ou défen sives.
Dan s un secteur bien délim ité, un cinquièm e
dépôt regroupe plusieurs in str uments.
Ce schém a constitue une prem ière approche
de l’organ isation in itiale du dépôt. Il se fonde
sur les indices mobiliers effectivement m is en
évidence par la fouille et déposés au n iveau du
fond de la fosse. Tous les éléments en m atér iau x
pér issables nous échappent. Ils doivent occuper
les espaces apparem ment vides et nous obligent à
pendre en compte une réalité bien plus complexe
dont beaucoup d’éléments nous échappent. Par
ailleurs, de nombreux indices taphonom iques et
de rares traces de parois témoignent de l’existence d’un coffrage ou pour le moins de parois
qui défi nissent un espace vide à l’intérieur duquel
différents objets peuvent m igrer en dehors de
189
STÉPHANE MARION – J EAN-PAUL GUILLAUMET
leur position in itiale de dépôt. Par fois, ce qui
complique encore davantage la lecture proposée, des objets semblent déposés en hauteur, par
exemple : accrochés au x parois de la chambre,
posés sur un meuble ou sur le couvercle d’un récipient. Par la disparition des m atières périssables,
ils ont chuté sur le reste du dépôt, com me l’écuelle
de la sépulture 670 en position ver ticale le long
de la paroi ou encore les armes de la sépulture
10 56. Dans cette dern ière, les éléments du ceinturon, sans doute déposés, au-dessus des vases,
sont tombés dessus et dedans. Épée et lance sont
coincées entre des vases et la paroi et une fibule
est au-dessus, en suspension improbable. Cette
situation semble cor respondre à la suspen sion
de la panoplie contre la paroi au-dessus et en
arr ière-plan des vases.
LES COUTEAUX (figs. 20 8-20 9)
Un prem ier groupe se dégage d’emblée avec l’association ossem ents anim au x-couteau. Cet assemblage se retrouve dans on ze sépultures. Ces
couteau x appar tien nent à deu x grandes catégor ies typologiques. Le couteau de tradition scythe
a une lame à dos et tranchant courbes mun ie
d’une cour te soie dans le même plan avec m anche
en bois ou en os dispar u. Le couteau celtique a
une lame au dos sub-rectiligne ou légèrement
concave. Le m anche, dan s son prolongement,
avec ou sans plaquettes, se ter m ine souvent par
une boule ou un an neau. En dépit de cette diversité mor phologique, ces catégor ies formelles
semblent recouvr ir des fonctions sim ilaires. Ils
ont deu x modules différents. Les couteau x de
Fig. 20 8. Les couteau x de la nécropole de Ludas associés au dépôt de faune
190
COUTEAUX, FORCES ET AUTRES INSTRUMENTS DANS LES SÉPULTURES DE LUDAS
Fig. 20 9. Les couteau x de la nécropole de Ludas associés au dépôt de faune (in fographie St. Mar ion)
191
STÉPHANE MARION – J EAN-PAUL GUILLAUMET
Fig. 210 . Les couteau x de la nécropole de Ludas associés au dépôt d’ar mes ; in str uments taillants de la nécropole
de Ludas associés au x restes incinérés; les couteau x de la nécropole de Ludas isolés dan s des sépultures
dépour vues de faune (in fographie St. Mar ion)
taille moyen ne ont une longueur de lame compr ise entre 8 et 13 centimètres. Les grands couteau x ont des lames entre 18 et 26 centimètres.
Sans proposer de déter m inations trop précises,
192
on peut considérer que ces couteau x, mun is de
dos relativement large, sont bien adaptés au x
préparations culinaires, notam ment au x découpes de viande. Leur association avec le dépôt de
COUTEAUX, FORCES ET AUTRES INSTRUMENTS DANS LES SÉPULTURES DE LUDAS
faune suggère et ren force une telle hypothèse.
le suggèrent leur association et leur situation au
Les couteaux sont les seuls objets dans les tombes
sein du dépôt et nous l’inter prétons com me un
associés spatialement au x restes de faune ce qui
ser vice à découper.
Deu x autres sépultures (879 et 1267) dépourpermet d’affi r mer le caractère volontaire de cet
vues de faune possèdent un outil tranchant. Il
assemblage bien qu’il existe des dépôts de faune
dépour vus de couteaux. Armé de cette hypothèse
est avec les restes incinérés et accompagnés de
fonction nelle, il est possible d’exam iner d’autres
fibules et dans un cas de par ure. Ces exemplaires
cas moins évidents.
par tiellement con ser vés ont une mor phologie
Un deu xième groupe rassemble des couteau x
différente. Ce sont des lames plutôt cour tes et
isolés dan s l’espace de la sépulture (fig. 210).
trapues par ticulièrem ent m inces avec un dos
Il concer ne trois sépultures (659, 70 3 et 958).
très étroit. Ces caractér istiques per mettent de
Mor phologiquement, ils ont les mêmes caractéle défi n ir com me des rasoirs, un ique vestige des
accessoires de toilette qui font par tie de la sphère
r istiques, les mêmes modules et la même diversité typologique que les exemplaires précédents.
intime du défunt et de ce fait déposés sur le bûDan s ces sépultures dépour vues de restes de
cher funéraire.
faune, le couteau occupe l‘emplacement dévolu au dépôt de faune dan s d’autres en sembles.
LES FORCES (fig. 211)
L’espace laissé libre autour du couteau per met
d’accueillir un module quadrangulaire semblable
à ceu x qui sont révélés par la taphonom ie des
Deux sépultures fém in ines (685 et 654) ont livré
restes de faune. Dès lors on peut émettre deu x
chacune une paire de force en fer. Elles sont de
hypothèses équiprobables : le couteau est le seul
dimension moyen ne, une vingtaine de centimètémoignage d’une offrande de viande dépour vue
tres, et ne présentent pas de ressor ts par ticulièd’os ou, m ais cela semble peu probable, le dépôt
rement puissants, bien que celui de l’exemplaire
de la sépulture 685 adopte une section tr ianse lim ite au couteau, sur le mode de la pars pro
gulaire qui lui con fère sans doute davantage de
toto, d’une offrande alimentaire.
Dan s un seul en sem ble de la nécropole, deu x
couteau x sont associés.
Il s’agit du cas de figure
at ypique de la sépulture
686, où les deux couteaux,
associés à u ne pier re à
aigu iser, accompagnent
l’ar mement et la par ure.
Il s’agit d’une fosse relativement exiguë où, par ure,
ar m es et couteau x sont
rassemblés très au-dessus
du dépôt pr im aire constitué de vases et des restes
de l’individu, san s reste
de faune. Ces usten siles
constituent bien un équiFig. 211. Les sépultures à forces (in fographie St. Mar ion)
pement personnel com me
193
STÉPHANE MARION – J EAN-PAUL GUILLAUMET
résistance. Par leurs tailles, il ne s’agit pas de
forces spécifiquement liées au soin du cor ps de
dimen sion s bien in fér ieures. Elles sont con sidérées com me des objets polyvalents utilisés en
contexte domestique ou com me outillage plus
ou moins spécialisé (KAURIN 20 0 9). Ces objets
sont bien individualisés entre le dépôt de faune et
les restes incinérés com me quelques dépôts d’armes. Cette position donne à penser qu’ils sont liés
à une activité spécifique du défunt. La présence
d’une grande lame, m alheureusement incom plète, associée à la paire de force de la sépulture
685, suggère un métier du textile. L’opération
la plus vraisemblable est la tonte des draps en
laine. Cela con siste à égaliser les éléments qui
dépassent du tissu après le tissage. Les forces
coupent les plus gros morceau x et un peigne en
bois rebrousse le duvet qui est tondu au moyen
d’une grande lame appelée larget au XVIII e siècle
d’après l’Encyclopédie de Diderot et d’Alember t.
La fi nition s’exécute par abrasion au moyen d’une
br ique ou d’une pierre. La sépulture 654 est aussi
une tombe fém inine et nous proposons aussi que
la défunte exécutait des travau x en rappor t avec
le tissu. Une troisième, la 10 51 est aussi concernée par cette activité avec la présence d’une fusaïole en terre cuite.
LES TROUSSES (fig. 212)
Trois sépultures m asculines (665, 90 4 et 10 57)
possèdent des assemblages par ticuliers en fer.
Trouvés groupés, ces éléments semblent constituer de vér itables trousses composées d’in str uments complémentaires sans doute dévolus à une
ou des activités bien précises. Dans la sépulture
665, deu x fibules semblent même assurer la fermeture d’un contenant souple. L’apparente cohérence de la composition de ces trois ensembles
ne peut ten ir au hasard. En effet, ces trousses
associent toujours au moins des instr uments aux
fonctions complémentaires de petites tailles : rasoirs ou scalpels, à la lame dans le prolongement
du m anche et pointes ou taillants mun is d’un
194
em m anchement en bois emboîté dan s la soie
en fer et d’une par tie travaillante per pendiculaire à cet em m anchement. Souvent réduite par
la corrosion à une simple pointe de métal sans
épider me, cette par tie utile n’est pas toujours
identifi able. Dan s son état d’usage, elle perce,
gratte, en lève ou taille.
La trousse de la sépulture 665 est la plus modeste : deu x rasoirs-scalpels et un poinçon ou
une gouge. La 90 4 regroupe cinq objets : deu x
rasoirs-scalpels, un outil taillant au tranchant
aux extrém ités arrondies m iniature des couteaux
à pied d’un bourrelier et deu x tiges rondes fi nement décorées dan s leurs par ties supér ieures,
aiguille ou cuillère dont les par ties dispar ues empêchent une identification fi ne. Un rasoir scalpel
et le « taillant » sont ornés à la base du m anche
ouvragée par une perle et sont de la même m ain.
La 10 57 regroupe deu x rasoirs-scalpels, un outil
taillant au tranchant en biais et un poinçon à
cause de sa section arrondie continue. Une virole
en fer et son clou de fi xation suggère un ren forcement d’un des deu x m anches.
Des p oin tes ou taillan ts se r etr ou ven t
dan s quelques sépultures con tem porain es ou
sub-con tem porain es. Ils son t en trois exem plaires dan s la sépulture 2 à in cin ération de
Magyarszerdahely – H om oki-dűlő (CCFH I).
Malgré l’absence de coupes, nous proposons de
déterm iner à partir de la form e asym étrique ou
sym étrique de la partie active, deux scalpels (1
et 2) et un poinçon (3). La sépulture 34 du site
de Chotin (Slovaquie) (RATIMORSKÁ 1975)
con tien t au m oin s deux poin tes ou taillan ts,
deux rasoirs scalpels, un e hache et un e lim e,
dont l’organisation dans le dépôt n’est pas décrite précisém en t. Quatre autres poin tes ou
taillan ts dan s la sépulture 48 de Potten brun n
(Autrich e) (RAMSL 20 0 2) son t in terprétés
com m e des pointes à graver ou ciseler, des instrum ents de tournage du bois, des poinçons ou
alèn es utilisés pour percer cuirs et peaux. La
présen ce de débris de bron ze dan s cette sépulture a orien té l’in terprétation en faveur d’activités ar tisanales de précision liées au métal
COUTEAUX, FORCES ET AUTRES INSTRUMENTS DANS LES SÉPULTURES DE LUDAS
Fig. 212. Les sépultures à trousse (in fographie St. Mar ion)
(or fèvre) ou associant métal et cuir : «cordonn ier par exemple » (RAMSL 20 03). Cependant
l’organ isation même du dépôt ne plaide pas en
faveur de ces hypothèses. En effet, les débr is
de bron ze se trouvent avec les restes incinérés
dan s le vase ser vant d’urne alors que les quatre
pointes constituent un ensemble autonome sur le
fond de la fosse. Elles sont associées à un rasoir
scalpel de moyenne dimension à lame concave et
à un anneau de bron ze. Cette trousse a une composition proche (pointes ou taillants et rasoirs
scalpels) de celles des sépultures de Ludas. En
France, sur le site de Bobigny Hôpital Avicen ne,
un adolescent (tombe 483), décédé entre 10 et
14 an s, est in humé accompagné d’un en semble
de pointes ou taillants, d’un taillant et d’une
rasoir scalpel. À Tisiche (CZ), dan s une tombe
à in hum ation de guer r ier de LT B1, un peu à
l’écar t de la nécropole, une trousse est déposée
au n iveau du bras gauche. Elle se compose d’une
paire de forces, deu x rasoirs scalpels, et quin ze
fragments de pointes ou taillants. Parm i ceux-ci,
nous pouvon s identifier deu x poinçon s complets
(9 et 13), trois m anches (4 à 6), deu x lames de
195
STÉPHANE MARION – J EAN-PAUL GUILLAUMET
scalpel (7 et 15), une extrém ité de gouge en dem icercle (14) qui peut fonction ner avec la tige 10 et
trois instr uments de section active rectangulaire
(1-2 en semble, 3 et 8). D’après Pavel San kot, le
t ype de mobilier et le r ituel de cette tombe sont
rares dan s cette région, au nord de Prague et
s’apparentent à des tombes du ter r itoire autr ichien actuel (SANKOT et al. 20 0 7).
Ce rapide tour d’horizon de la documentation
disponible pour l’Europe Celtique au cours de
La Tène B et C1 a perm is de mettre en évidence
d’autres trousses sim ilaires à celles de Ludas toujours dans des tombes m asculines de guerrier.
Cur ieusement et à quelques exceptions près, il
s’agit d’une période au cours de laquelle l’outillage
se révèle for t discret dans les assemblages funéraires. De fait, il ne semble pas que les activités
productives et ar tisanales soient alors valorisées
par les dépôts funéraires. Dans ce contexte de
rareté globale de l’outillage, l’interprétation de ces
trousses ne va pas de soi. Différents auteurs évoquent toujours, parm i d’autres hypothèses, le travail du bois, du cuir ou d’autres matières souples
qui expliquerait bien l’association de poinçons et
d’ustensiles tranchants com me il a été longtemps
écr it pour le dépôt de Celles (GUILLAUMET
1983). Cette inter prétation soulève cependant
196
quelques interrogations dans la mesure où ces
objets sont de petites tailles et ne sont pas des
représentation s complètes des action s à envisager dans chaque métier. Si on laisse de côté
les hypothèses ar tisanales, ces trousses peuvent
aussi évoquer la sphère des soins vétér inaires
et chirurgicaux dont les instruments sont fonctionnellement proche des interprétations précédentes. Ils ser vent alors à couper, inciser, percer,
gratter et enlever, d’une manière délicate au vu
de leur taille, des m atières molles et dures des
hom mes et des animaux. Cette proposition aurait
le mérite d’expliquer la composition répétitive des
assemblages, leur association dans des trousses
por tatives et leur dépôt dans des sépultures de
guerriers. Ainsi, le nombre impor tant de trousse
dans la nécropole de Ludas correspond à la for te
propor tion de sépultures de guerrier (25% du corpus soit 20 sur 82) dans cette nécropole. L’étude
fi ne de ces humbles vestiges ferreux, maltraités
par le temps et souvent oubliés lors des études, a
perm is de préciser les usages et nom s de ces tiges
fragiles et proposer deux types d’ensemble cohérent, un masculin et un fém inin et leur fonction.
La reprise d’autres ensembles oubliés permettra
sans doute de découvr ir de nouveaux types de
trousses et comprendre leur évolution.